Rencontre avec Pierre Arquié
Pierre Arquié est secrétaire de l’Association Ethique et Investissement. Il est par ailleurs directeur financier de la Congrégation Notre-Dame, Chanoinesses de Saint-Augustin. A ce titre, il doit notamment gérer les placements de la congrégation.
Qu’est-ce que l’association Ethique et Investissement et comment l’avez-vous connue ?
La Congrégation Notre-Dame est un des fondateurs de l’association Ethique et Investissement qui fut créée en 1983 à l’initiative de Sœur Nicole Reille, alors économe de la Congrégation. La volonté est de garantir que l’épargne des congrégations est bien placée selon leurs valeurs de justice, de respect de l’homme et de l'environnement.
A l’époque, Il s’agit du premier mouvement français en matière d’éthique des investissements. Succédant en quelque sorte à Nicole Reille par mes fonctions de directeur financier de la Congrégation Notre-Dame, j’ai été amené tout naturellement à militer au sein de cette l’association Ethique et Investissement.
Quelle sont les actions menées par Ethique et Investissement ?
L’association s’efforce de faire en sorte que les entreprises aient un comportement de plus en plus éthique et exemplaire. Nous disons : "aucune entreprise n'est parfaite ; toutes sont améliorables".
L'association agit de deux façons : une action directe auprès des entreprises, et une action d’accompagnement auprès de ses adhérents (particuliers, congrégations religieuses, et sociétés de gestion de portefeuilles). Pour la première mission, elle fait la démarche d’appeler l’entreprise pour la sensibiliser au fait de devoir mieux se comporter. L’accueil reçu est variable, allant du rejet au vrai dialogue. Pour la seconde mission, elle aide les adhérents à réfléchir aux placements qu’ils font.
Comment arrivez-vous à faire bouger les choses dans les entreprises ?
Nous ne sommes pas seuls. Il y a une multitude de fonds d’investissement socialement responsables (ISR), et un certain nombre interpellent aussi les entreprises. il y a également les agences de notation extra-financière qui évaluent le degré de Responsabilité Sociale et Environnementale des entreprises cotées.
Et il y a l'opinion publique : si une entreprise que nous contactons ignore superbement ce sur quoi nous attirons son attention, elle met en jeu sa réputation. Et les entreprises sont particulièrement sensibles à leur réputation.
Et les investisseurs ? Que leur apportez-vous ?
L’association est aussi un lieu de réflexion qui aide ses adhérents à réfléchir au sens qu'ils donnent à leurs placements.
Certains font de l'ISR en se disant qu'une entreprise responsable sera plus rentable à long terme : leur motivation est financière, pas éthique.
Nous, nous sommes à l'autre bout du spectre. Nous sommes des actionnaires qui veulent s’assurer que l’entreprise a un comportement éthique. Si ce n’est pas le cas, nous n’investissons pas. Si pour être éthique, il faut que l’entreprise soit moins rentable, et bien nous le préférons.
Ethique et Investissement propose des formations couvrant les deux aspects, technique et éthique, pour les économes des congrégations et les laïcs qui les accompagnent dans leur mission.
Son action la conduit aussi à organiser des conférences ou des colloques pour se pencher sur une question précise.
Vous avez invité Oikocredit à participer à votre prochain colloque. Pouvez-vous nous en parler ?
Notre prochain colloque se tiendra à Paris le 14 avril 2015 et pose la question « En tant qu’investisseur, comment puis-je favoriser un développement de l’Afrique Sub-Saharienne, durable et qui profite à tous ? »
Oikocredit, en tant qu’investisseur social, connait bien les IMF locales et peut témoigner de la façon dont ces investissements aident les gens. Le savoir-faire d’Oikocredit sur le terrain est important et leur modèle d’accompagnement au-delà du soutien financier apporte une réponse essentielle à la question que pose le colloque.
Qu’auriez-vous envie de dire aux investisseurs pour qu’ils viennent à ce colloque ?
L’Afrique est à un moment de grand changement, où il y a à la fois tous les problèmes que l’on a connus historiquement – dictatures, corruption, délabrement des infrastructures – et en même temps une nouvelle Afrique moderne qui émerge avec la démocratie en marche, une économie plus stable, une classe moyenne qui se développe et fait tourner l’économie de certains pays.
Il y a moyen pour l’investisseur de trouver des acteurs dans lesquels investir et qui vont soutenir ce développement durable et qui profite à tous.